• L'âge des ténèbres

    Je parle trop de sujets peu sérieux, notamment de films (à part quelques chefs d'oeuvre importants comme The Box, La route, etc...), mais tant pis, je veux juste parler de celui ci pour illustrer certaines "tendances fondamentales" de l'époque.

    J'ai pris beaucoup de plaisir à voir et revoir les films du canadien Denys Arcand : Le déclin de l'empire américain, Les invasions barbares, et le dernier : L'âge des ténèbres.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/L'%C3%82ge_des_t%C3%A9n%C3%A8bres

    le déclin de l'empire américain date de 1986 je crois, autant dire de la préhistoire : c'était l'époque où l'affrontement Est-Ouest faisait rage de ses dernières flammes (factices), avant de faire place à la brève illusion (qui aura duré de décembre 1989 à Août 1990) du nouveau monde enfin pacifié, puis au choc des "civilisations", à l'affrontement Nord-Sud, etc...rappelons nous quand même que 1986 c'est juste trois ans avant que les premières affaires de voile islamique éclatent dans les écoles françaises, et que l'on assiste (avec terreur, en ce qui me concerne) à une manifestation en plein Paris, au printemps 1989, de musulmans enragés hurlant "Fuis fuis Rushdie" et appelant au meurtre du blasphémateur...tout cela sans aucune réaction des pouvoirs publics ou de la police, ni des associations "antiracistes" !

    "L'âge des ténèbres" est un film que j'ai vu et revu avec bonheur, il est très bien réalisé, pas de problème, et j'avoue apprécier ce genre d'humour grinçant et , disons le, assez "épais" quand même. On passe un bon moment, et c'est toujours ça de pris, dans la France de Sarkozy...

    A première vue, c'est aussi un film sympathique, et assez désespéré : ce brave Jean-Marc Leblanc (patronyme qui n'a pas été choisi au hasard) qui se réfugie dans l'imaginaire (assez peu subtil, et de nature préférentiellement sexuelle) pour "fuir" sa vie banale et sans panache, il possède (de manière exagérée pour les besoins du scénario bien sûr) des traits en lesquels nous pouvons nous reconnaître. Il est bien gentil, en victime de l'évolution de la société, pas raciste pour un sou...et s'il devient un peu violent à la fin, c'est pour notre plus grand plaisir (notamment quand il défonce la voiture de l'automobiliste irascible qui l'insulte, ou bien quand il quitte sa femme sur un "je me dis quelquefois que je pourrais te tuer" asséné sur un ton si calme et d'autant plus convaincant).

    a première vue ai je dit....car si l'on y réfléchit bien c'est un film qui assume "implicitement", sans le dire franchement, une position tout à fait déplaisante, et assez ignoble il faut bien le dire, vis à vis de la réalité du monde occidental contemporain, celui du Québec notamment (que connaît bien Arcand je présume), où les "accomodements raisonnables" , le politiquement correct de façade, et le multiculturalisme sont poussés à l'extrême.

    J'avais ici même, le 27 juillet 2009, donné des extraits du "pétage de plomb" manifeste d'un bibliothécaire canadien masculin:

    http://www.blogg.org/blog-30140-billet-ou_vas_tu_quebec____infinite_justice_-1058987.html

    depuis, son blog et les sites (officiels) sur lesquels il déversait ses torrents d'injures délirantes, ont été soit fermé (pour le blog) soit "apurés" par les "autorités compétentes".

    Mais il reste qu'il s'agit là d'un symptôme à ne pas sous-estimer : ce pauvre homme avait manifestement dû subir certaines avanies qui rappellent celles (imaginaires) que rencontre Jean-Marc Leblanc dans "L'âge des ténèbres"...

    On dira : il vaut mieux réagir comme Jean-Marc Leblanc, c'est à dire en gros en fuyant dans des masturbations (et pas des masturbations intellectuelles) agrémentées d'histoires à l'eau de rose, que comme ce bibliothécaire québécois qui, je l'espère, va mieux aujourd'hui, en mettant en ligne des torrents d'injures délirantes contre "la police" , "les femmes" ou autres...

    Et je suis bien d'accord !

    Seulement : est ce la seule voie de salut pour l'homme blanc aujourd'hui (je dis bien l'homme blanc, pas la femme) ? la branlette ou le délire paranoïaque ? pour écarter bien sûr l'hypothèse de passages à l'acte encore plus violents, nous sommes gens de bonne compagnie !

    Si c'était le cas ce serait effectivement pour le coup bien désespérant !

    or c'est un peu la "thèse" (implicite, encore une fois) qui se "dégage" du film !

    Et je dirais même que Denys Arcand va encore plus loin : il suggère (et de manière assez tonitruente) que la seule échappatoire à ce choix disons...cornélien, mais un peu restreint quand même, c'est le sexe libertin (comme disent ces gens là, qui ont horreur des gros mots du genre "grosse partie de baise"), trouvé au hasard des sites de rencontre, petites annonces et autres "speed dating".... soit t'es moderne soit t'es relou coco !

    et bien sûr, toutes les alternatives : spiritualités, lectures, religions, études, sont des retours obscurantistes au Moyen Age et aux croisades, comme le montre le film quand il suit notre pauvre Leblanc aux bras d'une folle , adepte de Tolkien et des tournois de chevalerie, qu'il a rencontrée au "speed dating" où il accompagnait son ami et collègue black (qui lui, le veinard, s'est dégotté une blonde canon et nymphomane)... il faut les comprendre , les deux hommes : ils ont comme collègues féminines une supérieure hystérique qui fait tout ce qu'elle peut pour les sacquer, et une fille charmante mais...lesbienne, qui leur raconte tous les matins ses chaudes nuits avec sa...femme. La femme est l'avenir de l'homme, mais...pas dans le même lit svp .

    Avec sa dulcinée complètement ravagée notre ami Leblanc se rend donc à une fête moyennâgeuse, où il se battra en duel avec le Prince noir pour les beaux yeux de sa "dame" (et c'est tout ce qu'il aura comme récompense, plus un pelotage de seins, mais plus bas pas question , il faut attendre le "grand amour"), une fête où un flic complètement dingo portant un string (="homosexualité refoulée", ben voyons!) et  par dessus une cotte de maille, galvanisera la chrétienté contre les envahisseurs musulmans...

    qu'est ce qu'il dirait s'il lisait ce blog et les groupes associés !

    Morale (clairement affichée) : en dehors du sexe "libéré et no future", tout est Moyen Age , fanatisme, retour de la Bête immonde, du grand méchant blanc facho et intolérant !

    Elle est d'ailleurs énoncée précisément par l'ami noir de Leblanc (ou du blanc Leblanc, si vous voulez) qui essaye de convertir la dulcinée foldingue et moyennâgeuse au sexe libertin en l'entrainant vers une fenêtre d' où l'on voit un cimetière et en lui demandant :

    "à ton avis, si les âmes de ces corps glacés dans ces tombes  pouvaient revenir à la vie juste pour cette nuit , que désireraient elles : relire Emmanuel Kant ou bien faire l'amour toute la nuit ?"

    bien tenté mais échec sur toute la ligne : la dulcinée du branleur blanc préfère "mieux se connaître avant de faire ça"...

    et quant à nous, s'il nous posait la même question, nous répondrions sans hésiter : "Relire Immanuel Kant"

    comme quoi il n'était pas besoin d'écrire tout cet article pour marquer ma différence avec Denys Arcand !

    bon on me dira que j'exagère un peu : Denys Arcand propose quand même, à sa façon, une alternative, puisqu'à la fin, Jean-Marc Leblanc renonce à ses maîtresses imaginaires, leur disant solennellement adieu , il quitte sa femme (trop) réelle bien sûr, et s'en va vivre loin de tout dans une espèce de "chalet" face à la mer : il s'y consacrera aux loisirs sains, comme jardiner, faire des confitures, etc....

    bref une version moderne de la maxime "cultivons notre jardin"...

    Eh bien moi, figurez vous, j'ai d'autres ambitions pour l'humanité !

    La bonne nouvelle, l'Evangile  que je désire transmettre ici à notre ami le pauvre blanc Leblanc, c'est qu'il existe une autre option que la branlette ou le passage à l'acte violent, ou le jardinage...

    au fond Denys Arcand est un adepte du thatcherisme !

    car n'est ce pas Margaret thatcher qui nous a présenté la charmante Tina : T. I .N. A = "There Is No Alternative" ?

    toutes les maîtresses (imaginaires) de Leblanc devraient s'appeler Tina...quant à moi, si une femme me dit qu'elle s'appelle ainsi, je change de trottoir...et même de rue..et même de ville..et même de pays !

     dommage car c'est un beau prénom ...

    la bonne nouvelle de l'existence d'une alternative, d'une "Dame" dans les cieux, une Béatrice  si vous voulez, (dont Borgès nous a caritablement prévenus qu'elle n'existe pas) , c'est, je l'ai déjà dit hier :

    l'épée du dit inter (interdit) , l'épée flamboyante du Cherubin qui garde le jardin d'Eden , qui interdit la jouissance.

    Car, si vous voulez bien considérer que :

    -toute jouissance est entachée de passivité (Husserl)

    -Dieu est l'Acte pur, sans aucun élément de passivité

    -notre tâche ici bas, le sens de notre vie si vous voulez, est de devenir semblables à Dieu autant que nous le pouvons

    alors il nous faut, autant que nous le pouvons, nous abstenir de toute jouissance !

    alors il me semble que nous sommes rendus (sans nous rendre) ! CQFD !

    ce 'est pas un commandement divin, c'est de la logique...de la logique de la philosophie !

    ce qui m'amène a ajouter cette autre bonne nouvelle : si, comme l'assure Eric Weil dans "Logique de la philosophie" justement  : "Le Moi ne peut pas jouir " (et c'est pour ça que les hommes ont inventé un Moi dans les cieux qui jouit tout le temps, Dieu en somme), alors ne sommes nous pas entraînés à soupçonner que la jouissance n'existe pas ?

     Lacan a bien dit, lui, qu'il n'y a pas de rapport sexuel !

    Le Moi ne peut pas jouir, cela dit bien ce que cela veut dire, et c'est aisément vérifiable "au laboratoire" (au lit, ou au bistro, comme vous voulez)...carrappelez vous : vous faites l'amour avec l'amour de votre vie, c'est grand, c'est grandiose, c'est énorme, c'est divin, ça monte, cette fois c'est la fin, l'achèvement parfait, vous allez...vous allez...et puis...plus rien ???!!!

    tout ça pour ça ?

    et avec l'alcool, ou la drogue : pareil !

    C'est toujours le prochain verre qui vous rendra semblable à Dieu, qui vous unira à la Vérité comme épiphanie apocalyptique, qui vous ouvrira ce Livre auquel doit aboutir le Monde... jamais ce verre ci...

    et croyez moi : vous sombrerez dans l'inconscience, ou la mort, bien avant de le boire, ce "dernier verre" qui vous égalerait au Créateur du Ciel et de la Terre, et accessoirement vous identifierait à vous même dans le statut d'une substance éternelle et immobile... mais la bonne nouvelle, l'Evangile consiste aussi à dire que Sartre a tort d'en conclure que :

    "mais Dieu n'existe pas : l'homme est une passion inutile"

    car toute passion humaine est image, symbole (souvent défigurée) de la Passion du Sauveur-Médiateur-Logos; qui , non pas a eu lieu dans l'Histoire, mais A Lieu perpétuellement (en nous même) pour que l'homme soit Acte pur

    les Alcooliques anonymes ont une bonne formulation pour ceci :

    "un verre c'est trop, mille pas assez !"

    ou encore : rappelez vous les articles sur les nombres, et l'Infini, "L'Infini se laissait pousser comme une porte (ça c'est généralement quand on est vire, comme Nemrod quoi). Il y a deux manières de lire les nombres entiers, ceux qui d'après Kronecker viennent de Dieu alors que tout le reste vient de l'homme : comme mauvais infini, la suite infinie de 1,2,3,4 etc...

    et comme "tous contenus" dans le 1, le UN, qui est Dieu ; ceci de par l'opération de l'inversion qui associe à un nombre son inverse:

           n →  1/n      

    Alors pourquoi ajouter un verre à un autre verre, ce qui vous rapprochera, non pas de l'infini, mais du zéro, du Néant, de la Nuit de l'inconscience, de l'égalité simple ?                     

    pensez y !

    et vous apprendrez aussi de moi, si vous ne le savez  déjà, que votre femme jouit toujours avec un autre..un inconnu qui n'existe pas...un inconnu dans les cieux, ou du fond de la nuit...jamais avec vous, si du moins vous êtes le même que vous, et pas le Je qui est un Autre !

    bref, pour en revenir au sujet :

     "L'âge des ténèbres" : un film sympathique et plutôt désespéré ; à voir absolument, on passe un bon moment ;un  film qui dénote une vision du monde assez ignoble...

    Est ce que je n'en aurais pas dit ainsi beaucoup sur l'époque et ses ambiguïtés ?

    sur ce joyeux Noel, bonne année, Happy Hannukah, joyeuses Pâques, shabbat shalom, et surtout : bonne bourre ! 


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